Ce billet emblématique est unique dans l’histoire de la Banque de France. Souvent considéré comme le plus beau billet français pour ses qualités techniques et esthétiques, le 5 000 francs Flameng a connu, à la fabrication comme à l’émission, de nombreuses péripéties.
Le plus grand des billets nationaux (25,6 cm de longueur) est l’œuvre du peintre François Flameng (1856-1923). Connu pour ses tableaux historiques et ses portraits, il a également exécuté des fresques et panneaux décoratifs qui ornent des édifices parisiens : la Sorbonne, le Palais de justice, l’Opéra-Comique, le restaurant « Le train bleu » de la gare de Lyon…
En 1891, l’artiste réalise les premières esquisses d’un billet, d’une valeur faciale de 1 000 francs, qui devait être la première coupure française imprimée en quatre couleurs. Mais ce billet, produit dans les dernières années du XIXe siècle, ne sera pas mis en circulation et le stock d’un million de coupures sera détruit quelques décennies plus tard. Conservés en réserve, les clichés d’impression connaissent une autre destinée. En 1914, lorsque la guerre éclate, la Banque de France souhaite disposer d’une coupure de très forte valeur faciale.
Le « Flameng » est alors imprimé en urgence, cette fois-ci en 5 000 francs, avec de nouvelles couleurs et sur un papier doublement filigrané. Pour autant, le billet ne circulera que… vingt ans plus tard, en 1938, lorsque montent les tensions internationales, et pour sept ans seulement, jusqu’en 1945.
Quelles sont les causes d’une aussi longue attente ?
Tout d’abord, la Banque de France a longtemps hésité à émettre ce billet qui comportait des techniques de sécurité avancées : elle craignait de se voir reprocher de les réserver aux porteurs de grosses coupures – les petites coupures en étant dépourvues –.
Par ailleurs, la facture du billet était jugée parfois trop fantaisiste et pas assez « monétaire ». Il est vrai que le « Flameng », de style art nouveau, a une facture très picturale, mélange de symbolisme et de réalisme.
Au recto, il présente, à gauche, un couple allégorique personnifiant l’alliance du travail et des sciences sur un fond d’usines en activité. À droite, devant un soc et une charrue, un Cupidon tient une balance de sa main droite et, de l’autre, un grand blason ouvragé sur lequel est gravé « Sagesse et Fortune », en référence à la devise de la Banque de France « La sagesse fixe (c’est-à-dire : retient) la fortune ». En partie inférieure, un bas-relief montre des représentations des sciences, des arts, de l’industrie, de l’agriculture et du commerce.
Au verso, un seul grand tableau occupe tout l’espace. On distingue sur la gauche une allégorie du « Travail qui fixe (c’est-à-dire, de nouveau : qui retient) la Fortune » : un ouvrier tente de retenir une jeune femme aux yeux bandés, qui se tient en suspension sur la roue de la Fortune. À côté, un Cupidon tenant une pelle, un globe terrestre, un parchemin, un livre ouvert et des manuscrits à même le sol. À droite, sont assis côte à côte un homme barbu habillé en philosophe tenant compas et écritoire et un jeune paysan s’appuyant sur sa faux. À l’arrière-plan, on aperçoit en panorama le Pont Neuf de Paris et l’Île de la Cité.
Ainsi, la thématique de ce billet associe les ressources économiques de la France d’alors au monde des lettres, des arts et des sciences et à une représentation emblématique de la capitale.
Photos : Billet, maquettes et images : collections Banque de France
Publié le 29 juillet 2015. Mis à jour le 12 Septembre 2019