​​​​​​​Et si ma banque faisait faillite ? Entre mythe, réalité et protections modernes

Rédigé par Pierre Rousseaux, doctorant en économie au CREST (CNRS, Ecole Polytechnique, GENES) et Président cofondateur et rédacteur en chef d’Oeconomicus

Ah, la grande question qui hante nos nuits après avoir vu un film catastrophe sur la finance : “Et si ma banque faisait faillite ? Est-ce que je devrais vendre mes meubles pour survivre ?” Rassurez-vous, les banques ne tombent pas comme des dominos à la moindre secousse. Mais pour répondre sérieusement à cette question, il faut d’abord comprendre comment une banque fonctionne, ce qu’est une faillite bancaire, par quels moyens survient-elle, et ce que l’histoire nous a appris à ce sujet. Ensuite, nous verrons pourquoi vous pouvez dormir sur vos deux oreilles grâce aux protections modernes.

 

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À quoi sert ma banque ? Comment fonctionne-t-elle ?

Une banque est un intermédiaire financier, collectant des dépôts auprès de ses clients (les passifs) pour accorder des prêts ou réaliser des investissements (les actifs). Ce modèle repose sur la transformation de maturité : les dépôts, disponibles à tout moment, financent des prêts ou investissements à long terme. Cette structure, essentielle au fonctionnement des banques et de l’économie, dépend de la confiance des clients, qui déposent leur argent en échange de rémunérations sous forme d’intérêts, tout en conservant la garantie de pouvoir le retirer à tout moment. Cette confiance permet à la banque d’utiliser ces fonds pour générer des revenus, couvrant ainsi ses frais de fonctionnement et rémunérant ses déposants.

Les actifs d’une banque incluent principalement les prêts accordés aux particuliers ou aux entreprises, qui génèrent des intérêts. Par exemple, un prêt immobilier de 200 000 € à 2 % par an rapporte des revenus stables à la banque. Les banques investissent également dans des titres financiers, comme des obligations d’État ou d’entreprises, qui diversifient les revenus tout en limitant les risques. Enfin, elles conservent des réserves en espèces pour répondre aux besoins immédiats de liquidités. Quant aux passifs, ils représentent les obligations financières de la banque, comme les dépôts des clients (comptes courants, livrets d’épargne), qui doivent pouvoir être remboursés à tout moment. En cas de forte demande de retraits, la banque peut aussi recourir à des emprunts interbancaires pour combler temporairement ses besoins de liquidités. Ainsi, l’équilibre entre actifs et passifs est central dans la gestion d’une banque, garantissant sa solvabilité et sa stabilité.

Qu’est-ce que la faillite d’une banque ?

Au regard de la structure du bilan d’une banque, deux scénarios principaux peuvent donc conduire à sa faillite. Le premier survient lorsqu’une proportion suffisamment importante de clients retirent simultanément et massivement leurs dépôts (passif de la banque) à court terme. Ce phénomène, connu sous le nom de ruée bancaire (bank run), repose sur une perte de confiance des déposants. Comme les banques conservent uniquement une fraction des dépôts sous forme de liquidités, elles peuvent (théoriquement) rapidement se retrouver à court d’argent pour honorer les demandes de retrait. Ce scénario dramatique a marqué l’histoire et a été popularisé par de nombreux récits et représentations cinématographiques.

 

Un symbole de banque doré se démarque parmi des banques noires, illustrant la question de la confiance dans le secteur bancaire et la quête de fiabilité financière.

 

Le second risque majeur de faillite découle des mauvais choix d’investissement. Si les actifs de la banque, tels que les prêts ou les titres financiers, perdent significativement de leur valeur, la banque peut ne plus être en mesure de rembourser ses créanciers. Une gestion imprudente ou une exposition excessive à des investissements risqués peut ainsi déséquilibrer son bilan et la conduire à l’insolvabilité.

Les ruées bancaires (bank runs) : quand la confiance s’effondre

Pour comprendre les dynamiques des crises bancaires comme celles observées lors de la Grande Dépression, les économistes Douglas Diamond et Philip Dybvig ont développé, en 1983, un modèle théorique des ruées bancaires (ils se sont notamment distingués par ce modèle et ont reçu le prix Nobel d’économie en 2022). Leur théorie repose sur trois concepts clés. Tout d’abord, les banques pratiquent la transformation de maturité, en collectant des dépôts à court terme pour financer des prêts à long terme. Ensuite, il existe une asymétrie d’information entre la banque et les déposants, qui ne connaissent pas précisément la situation financière de l’établissement. Enfin, le modèle met en évidence la possibilité de deux équilibres : un équilibre normal où les déposants (les clients de la banque) maintiennent leur argent en banque, et un équilibre de panique où tout le monde retire ses fonds, entraînant une faillite.

En effet, dans le second équilibre, si les déposants craignent que la banque soit en difficulté ou que d’autres clients retirent massivement leur argent, ils seront incités à retirer leurs fonds rapidement pour éviter de perdre leur épargne. Cela crée une prophétie auto-réalisatrice : la panique devient rationnelle, car chaque déposant veut éviter d’être le dernier, lorsque les liquidités seront épuisées. Le point de bascule du premier au second équilibre peut venir d’une rumeur sur la banque, d’un manque de transparence de celle-ci, ou de facteurs externes (crise, panique générale).

Cette théorie a mis en lumière la fragilité intrinsèque du système bancaire, due à sa dépendance à la confiance des clients. L’importance réside donc dans l’apport de garantie au client pour que malgré des rumeurs ou autres éléments il ait suffisamment d’incitation à garder ses dépôts à la banque. Les chercheurs ont ainsi souligné le rôle crucial des garanties des dépôts et de la banque centrale en tant que prêteur en dernier ressort pour prévenir les ruées bancaires et stabiliser le système financier. Ce modèle reste une référence dans l’analyse des crises bancaires et a influencé les politiques de régulation financière mises en place dans de nombreux pays.

Qu’est-ce que la faillite d’une banque ?

Au regard de la structure du bilan d’une banque, deux scénarios principaux peuvent donc conduire à sa faillite. Le premier survient lorsqu’une proportion suffisamment importante de clients retirent simultanément et massivement leurs dépôts (passif de la banque) à court terme. Ce phénomène, connu sous le nom de ruée bancaire (bank run), repose sur une perte de confiance des déposants. Comme les banques conservent uniquement une fraction des dépôts sous forme de liquidités, elles peuvent (théoriquement) rapidement se retrouver à court d’argent pour honorer les demandes de retrait. Ce scénario dramatique a marqué l’histoire et a été popularisé par de nombreux récits et représentations cinématographiques.

Le second risque majeur de faillite découle des mauvais choix d’investissement. Si les actifs de la banque, tels que les prêts ou les titres financiers, perdent significativement de leur valeur, la banque peut ne plus être en mesure de rembourser ses créanciers. Une gestion imprudente ou une exposition excessive à des investissements risqués peut ainsi déséquilibrer son bilan et la conduire à l’insolvabilité.

Les ruées bancaires (bank runs) : quand la confiance s’effondre

Pour comprendre les dynamiques des crises bancaires comme celles observées lors de la Grande Dépression, les économistes Douglas Diamond et Philip Dybvig ont développé, en 1983, un modèle théorique des ruées bancaires (ils se sont notamment distingués par ce modèle et ont reçu le prix Nobel d’économie en 2022). Leur théorie repose sur trois concepts clés. Tout d’abord, les banques pratiquent la transformation de maturité, en collectant des dépôts à court terme pour financer des prêts à long terme. Ensuite, il existe une asymétrie d’information entre la banque et les déposants, qui ne connaissent pas précisément la situation financière de l’établissement. Enfin, le modèle met en évidence la possibilité de deux équilibres : un équilibre normal où les déposants (les clients de la banque) maintiennent leur argent en banque, et un équilibre de panique où tout le monde retire ses fonds, entraînant une faillite.

En effet, dans le second équilibre, si les déposants craignent que la banque soit en difficulté ou que d’autres clients retirent massivement leur argent, ils seront incités à retirer leurs fonds rapidement pour éviter de perdre leur épargne. Cela crée une prophétie auto-réalisatrice : la panique devient rationnelle, car chaque déposant veut éviter d’être le dernier, lorsque les liquidités seront épuisées. Le point de bascule du premier au second équilibre peut venir d’une rumeur sur la banque, d’un manque de transparence de celle-ci, ou de facteurs externes (crise, panique générale).

Cette théorie a mis en lumière la fragilité intrinsèque du système bancaire, due à sa dépendance à la confiance des clients. L’importance réside donc dans l’apport de garantie au client pour que malgré des rumeurs ou autres éléments il ait suffisamment d’incitation à garder ses dépôts à la banque. Les chercheurs ont ainsi souligné le rôle crucial des garanties des dépôts et de la banque centrale en tant que prêteur en dernier ressort pour prévenir les ruées bancaires et stabiliser le système financier. Ce modèle reste une référence dans l’analyse des crises bancaires et a influencé les politiques de régulation financière mises en place dans de nombreux pays.

Un exemple majeur de ruée bancaire – La Grande Dépression (1929-1933)

Un événement bien connu a produit une ruée bancaire avec d’importantes conséquences sur l’économie et le système financier : la Grande Dépression des années 1930. Cet épisode historique a permis de tirer des enseignements sur ces mécanismes et de mettre en place des dispositifs visant à contenir les risques de ruées bancaires. Depuis lors, bien qu’aucune ruée bancaire de grande ampleur ne se soit produite, certaines paniques, comme celle de Northern Rock en 2007 ou les tensions de la crise de 2008, ont été contenues grâce à des interventions rapides des banques centrales et des garanties étatiques, démontrant l’efficacité des outils de stabilisation modernes.

La Grande Dépression constitue l’une des crises économiques et bancaires les plus marquantes de l’histoire contemporaine. Son déclenchement est étroitement lié au krach boursier d’octobre 1929, qui a entraîné une chute vertigineuse des cours boursiers et une perte massive de richesse. Cet événement a eu des répercussions profondes sur l’ensemble de l’économie américaine, détruisant la confiance des investisseurs, des entreprises, et surtout des déposants bancaires. Craignant pour la sécurité de leur épargne, ces derniers ont commencé à retirer massivement leurs fonds des banques, déclenchant une ruée bancaire.

Les paniques bancaires se sont déroulées en trois vagues successives, aggravant progressivement la crise. La première vague, en 1930, a principalement touché les banques rurales du Midwest et du Sud, où plus de 1 350 établissements ont fait faillite. En 1931, une deuxième vague a conduit à la fermeture d’environ 2 300 banques supplémentaires, cette fois avec une concentration plus marquée dans le Nord-Est des États-Unis. Enfin, en 1933, la troisième vague a atteint son apogée, provoquant la faillite de plus de 4 000 banques supplémentaires. Au total, entre 1930 et 1933, près de 9 000 banques ont disparu, représentant environ un tiers du secteur bancaire américain. Dans les années 1930, le système bancaire américain était extrêmement fragmenté, avec de nombreuses petites banques locales opérant souvent dans un seul État ou une seule ville, contrairement à la forte concentration bancaire actuelle dominée par quelques grandes institutions. Cette fragmentation, due à des réglementations restrictives et à l’absence de réseaux interétatiques, rendait les banques plus vulnérables aux crises locales, ce qui explique l’ampleur des faillites pendant la Grande Dépression. Aujourd’hui, des réformes comme le Glass-Steagall Act et la consolidation bancaire ont favorisé l’émergence de grandes banques diversifiées et résilientes.

Les conséquences de ces faillites ont été dévastatrices. La masse monétaire (quantité de monnaie) en circulation a chuté d’environ 35 %, entraînant une déflation sévère et une contraction économique sans précédent. Les entreprises, privées de crédit, ont dû réduire leur activité ou fermer, ce qui a fait grimper le taux de chômage à 25 % en 1933. Le produit intérieur brut (PIB) des États-Unis a diminué de près de 30 % entre 1929 et 1933. La crise bancaire a amplifié la spirale récessive en fragilisant les institutions financières et en paralysant le système de crédit, essentiel au fonctionnement de l’économie.

Face à cette situation, des réponses politiques majeures ont été mises en place sous la présidence de Franklin D. Roosevelt. En mars 1933, le président a proclamé un “bank holiday” national, fermant temporairement toutes les banques pour stopper la panique et rétablir la confiance. La même année, le Glass-Steagall Act a été adopté, séparant les activités de banque commerciale et d’investissement pour limiter les risques systémiques (possibilité qu’une défaillance dans une partie du système financier entraîne un effondrement généralisé de l’ensemble du système). Par ailleurs, la création de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) a introduit une garantie des dépôts bancaires, réduisant ainsi le risque de ruées bancaires futures. Ces réformes ont posé les bases d’un système bancaire plus résilient et mieux régulé.

Faillites par mauvais investissements : l’apogée de la crise des subprimes

 

Représentation de la crise des subprimes avec une maison rouge en bois posée sur des billets de 100 euros, symbolisant les risques liés aux prêts immobiliers et au système bancaire.

 

Comme vu, la deuxième grande cause de faillite bancaire réside dans des mauvais investissements, c’est-à-dire lorsque les actifs détenus par une banque perdent brutalement de leur valeur. Contrairement aux ruées bancaires, où la confiance des déposants est mise à mal, ici, c’est la mauvaise gestion des placements ou des prêts qui conduit à l’effondrement. Ce risque est particulièrement marqué lorsque les banques prennent des positions excessivement risquées ou investissent dans des produits complexes et mal compris. Les exemples les plus emblématiques de ce type de crise incluent la crise des subprimes de 2008, mais également d’autres épisodes marquants comme la crise des caisses d’épargne américaines des années 1980.

La crise des subprimes est l’une des crises financières les plus profondes de l’histoire récente, marquant un tournant dans la perception de la fragilité du système financier mondial. Dans les années 2000, la politique monétaire accommodante de la Réserve fédérale américaine (FED) a maintenu des taux d’intérêt bas, rendant les emprunts immobiliers accessibles à une large frange de la population, y compris aux ménages les plus fragiles financièrement. Les banques, en quête de rendement, ont accordé des crédits hypothécaires à ces ménages, souvent sans vérifier sérieusement leur capacité de remboursement. Ces prêts, à haut risque, ont ensuite été transformés en produits financiers complexes appelés titres adossés à des actifs (MBS, Mortgage-Backed Securities), puis revendus sur les marchés financiers.

Lorsque les taux d’intérêt ont commencé à remonter en 2006-2007, de nombreux ménages emprunteurs subprimes se sont retrouvés incapables de rembourser leurs prêts (taux variables et non fixés pour la durée du prêt). Cela a entraîné une augmentation massive des défauts de paiement, faisant chuter la valeur des biens immobiliers et, par ricochet, celle des MBS. Les banques et institutions financières qui détenaient ces produits se sont retrouvées exposées à des pertes colossales. En septembre 2008, la situation a atteint un point critique avec la faillite de Lehman Brothers, l’une des plus grandes banques d’investissement au monde. Cet effondrement a provoqué une crise de confiance généralisée, gelant les marchés interbancaires et paralysant le système financier mondial. Les pertes sur les actifs toxiques se sont propagées rapidement à d’autres banques et institutions financières, révélant l’interconnexion et la fragilité du système.

Les conséquences économiques et sociales ont été dévastatrices. Une contraction du crédit a privé les ménages et les entreprises de financement, déclenchant une récession économique mondiale. Le chômage a explosé, les taux de suicide également, et les inégalités économiques se sont creusées. Face à cette crise, les gouvernements et banques centrales ont dû intervenir massivement. Aux États-Unis, le plan TARP (Troubled Asset Relief Program) a permis d’injecter des centaines de milliards de dollars pour recapitaliser les banques. En Europe, des mesures similaires ont été mises en place, soutenues par des politiques monétaires très accommodantes des banques centrales.

D’autres évènements similaires ont également sévi en Europe. La crise de la dette souveraine en Europe a mis en évidence les risques liés à l’exposition des banques aux dettes publiques des États. De nombreux pays, comme la Grèce, l’Irlande, et le Portugal, ont été confrontés à des niveaux de dette insoutenables après la crise financière de 2008. Les banques européennes, qui détenaient d’importants volumes d’obligations souveraines de ces pays, ont enregistré des pertes massives lorsque la valeur de ces obligations a chuté. Cette situation a menacé la stabilité du système bancaire européen, du fait des fortes interdépendances entre les banques des différents États membres, nécessitant des plans de sauvetage coordonnés par l’Union européenne et le Fonds Monétaire International (FMI), ainsi que des mesures d’austérité dans les pays touchés.

En France, le Crédit Lyonnais a subi de lourdes pertes au début des années 1990 en raison de placements hasardeux dans l’immobilier et de projets d’investissement internationaux mal gérés. L’explosion de la bulle immobilière et des choix stratégiques risqués ont plongé la banque dans une situation critique, nécessitant une intervention massive de l’État français. Cette crise a coûté plusieurs milliards d’euros aux contribuables et a marqué un tournant dans la régulation des institutions bancaires en France.

Prévenir les problèmes liés aux passifs : éviter les ruées bancaires

Pour limiter les risques de ruées bancaires, des dispositifs robustes ont été mis en place afin de protéger les déposants et de garantir la stabilité des institutions financières. L’un des outils les plus efficaces est le système de garanties des dépôts, tel que le Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution (FGDR) en France, qui protège jusqu’à 100 000 €par personne et par établissement, ou la FDIC aux États-Unis, qui couvre jusqu’à 250 000 $ par compte. Ces mécanismes réduisent l’incitation des clients à retirer massivement leurs fonds en cas de panique, rassurant ainsi les déposants même en période de crise.

En complément, les banques centrales jouent un rôle de prêteur en dernier ressort, fournissant des liquidités d’urgence pour empêcher qu’un manque temporaire de liquidités ne se transforme en crise systémique. En cas de tensions sur les marchés interbancaires, elles injectent également des fonds pour maintenir la fluidité des échanges financiers et renforcer la confiance des investisseurs.

De plus, en Europe, des mécanismes comme le Mécanisme de Résolution Unique (MRU) ont été créés pour gérer les défaillances bancaires. Ce système privilégie le renflouement interne (bail-in), où les pertes sont supportées par les actionnaires et les créanciers plutôt que par les contribuables ou les déposants. Ce dispositif réduit les répercussions des faillites bancaires sur l’économie globale. Enfin, les autorités financières ont adopté une communication proactive, apportant transparence et clarté lors des crises afin de limiter les rumeurs et d’éviter des comportements irrationnels des déposants.

Prévenir les problèmes liés aux actifs : éviter les mauvais investissements

Pour protéger les banques contre les conséquences de mauvais investissements, les régulateurs ont renforcé les exigences et la surveillance. Les accords de Bâle III imposent aux banques de maintenir un niveau élevé de fonds propres, avec un ratio minimum de 8 % par rapport aux actifs pondérés par les risques. Cela garantit que les banques disposent de réserves suffisantes pour absorber d’éventuelles pertes, limitant ainsi les prises de risques excessives.

En parallèle, les ratios de liquidité obligent les banques à conserver des réserves d’actifs liquides de haute qualité. Le Ratio de Couverture de Liquidité (LCR), par exemple, impose aux banques de disposer de suffisamment de liquiditéspour couvrir leurs besoins pendant 30 jours en cas de crise. Le Ratio de Liquidité à Long Terme (NSFR), quant à lui, veille à ce que les financements des actifs à long terme soient stables et sécurisés.

Pour renforcer encore leur résilience, les banques sont soumises à des stress tests réguliers, des simulations qui évaluent leur capacité à faire face à des scénarios de crise, comme une récession économique ou une chute des prix de l’immobilier. Ces tests permettent de détecter les faiblesses avant qu’elles ne deviennent critiques et d’imposer les ajustements nécessaires.

Enfin, les régulateurs assurent une supervision renforcée des grandes banques. En Europe, le Mécanisme de Supervision Unique (MSU), dirigé par la Banque centrale européenne, surveille les principales institutions financières, tandis qu’aux États-Unis, des organismes comme la SEC ou la Réserve fédérale imposent des contrôles stricts sur les investissements et les pratiques de prêt. Les banques doivent également limiter leur exposition aux risques spécifiques, comme les secteurs immobiliers ou les dettes souveraines, pour éviter des concentrations de risques susceptibles de fragiliser leur bilan.

Dormez tranquilles… ou presque !

Alors, votre banque peut-elle faire faillite ? Comme on l’a vu, théoriquement, oui. Le système bancaire repose sur un équilibre fragile, car il est étroitement lié à la confiance des clients et à la gestion prudente des investissements. Les ruées bancaires et les mauvais investissements resteront toujours des risques inhérents à ce modèle. Mais en pratique, les choses ont radicalement changé depuis les grandes crises du passé. Les mécanismes de protection mis en place au fil des décennies, combinés à des régulations toujours plus strictes, rendent ces scénarios hautement improbables aujourd’hui.

 

Une femme allongée sur des billets de banque, symbole de la confiance fragile dans le système bancaire et de la sécurité perçue de l’argent déposé en banque.

 

Grâce à des dispositifs décrits plus haut, le système bancaire moderne est infiniment plus robuste qu’il ne l’était pendant la Grande Dépression ou même la crise des subprimes. Ces outils fonctionnent : aucune ruée bancaire généralisée ou faillite systémique n’a été observée depuis plus d’une décennie, malgré des chocs comme la pandémie ou des tensions géopolitiques. Même les crises localisées, comme celle de Northern Rock en 2007, ont été rapidement contenues, sans propagation majeure.

Plus récemment, en 2023, plusieurs banques, notamment aux États-Unis (Silicon Valley Bank) et en Suisse (Credit Suisse), ont connu des faillites ou des crises majeures. Cependant, ces épisodes n’ont pas entraîné de contagion systémique dans les banques européennes, grâce à des régulations plus strictes et à des mécanismes de surveillance solides en Europe. Contrairement au système américain, où certaines banques régionales ne sont pas soumises aux mêmes règles de capital ou de liquidité, le système européen impose des exigences plus strictes en matière de fonds propres et de gestion des risques, ce qui renforce la résilience de ses institutions face aux chocs économiques.

Bien que le système bancaire européen soit déjà strict et robuste, des évolutions majeures sont encore en cours pour le renforcer davantage. L’Union bancaire, qui vise à garantir la stabilité du secteur bancaire à travers une supervision centralisée et des mécanismes de résolution des crises, reste incomplète en raison du blocage sur la création d’un Système Européen de Garantie des Dépôts (SEGD). Les pays du Nord (comme l’Allemagne) craignent que ce mécanisme les oblige à payer pour couvrir les faiblesses des banques du Sud, tandis que les pays du Sud souhaitent davantage de solidarité européenne.

Par ailleurs, l’Union des marchés de capitaux, qui vise à mieux intégrer les marchés financiers et diversifier les sources de financement des entreprises, progresse lentement en raison des différences juridiques et fiscales entre les États membres ainsi que des conséquences du Brexit, où Londres jouait une place centrale dans ce projet.

Et si l’impossible arrivait ?

Si malgré tout votre banque fait faillite (rappelez-vous ce que vous venez de lire, ce risque est quasiment impossible, d’autant plus en Europe), souvenez-vous, vos dépôts sont couverts par le Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution (FGDR) dans la limite de 100 000 € par client et par établissement.

Ce plafond inclut les comptes courants, comptes d’épargne (hors livrets réglementés comme le Livret A, garantis séparément par l’État) et comptes espèces liés à des produits d’épargne. En cas de défaillance, le FGDR procède à l’indemnisation dans un délai de 7 jours ouvrables pour ces produits. Concernant vos produits d’investissement, comme les actions, obligations ou parts de fonds d’investissement, ils sont couverts par la garantie des titres du FGDR, à hauteur de 70 000 € par client et par établissement.

Cette garantie s’applique uniquement si votre banque est incapable de restituer les titres ou de les rembourser. Par ailleurs, les espèces associées aux comptes-titres peuvent également être indemnisées, jusqu’à 70 000 €, ou incluses dans la garantie des dépôts si elles sont détenues par une banque. En revanche, les contrats d’assurance-vie ne relèvent pas du FGDR, mais d’un fonds de garantie spécifique dédié aux assurances. Celui-ci couvre jusqu’à 70 000 € par client et par compagnie d’assurance, offrant une protection complémentaire pour ces produits.

Enfin, vos prêts ne sont pas annulés en cas de faillite de votre banque. Ces créances, considérées comme des actifs pour la banque, sont généralement transférées à une autre institution financière ou à un gestionnaire spécialisé. Vous devrez donc continuer à rembourser votre emprunt selon les conditions prévues dans votre contrat initial, mais avec un nouvel interlocuteur.

Bien sûr, la perfection n’existe pas. Le risque zéro, tout comme le zéro calorie dans vos desserts, est une chimère. Mais les banques d’aujourd’hui ne sont pas des châteaux de cartes prêts à s’effondrer au moindre vent contraire. Au contraire, elles sont surveillées, régulées et équipées pour résister à de nombreux chocs, qu’ils soient économiques, financiers ou psychologiques. Alors, peut-être qu’un film catastrophe vous fera encore frissonner sur le sort de vos économies. Mais en réalité, sauf si vous avez tout placé sur un pari risqué aux Bahamas (dans ce cas, on ne peut rien pour vous), vous pouvez dormir sur vos deux oreilles.

Votre banque, et le système qui la soutient, sont bien armés pour éviter le pire. Et ça, c’est quand même plus rassurant que de cacher vos billets sous votre matelas !


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Publié le 31 Janvier 2025.